Commencement ~> 15


Gretta regardait avec espoir les papiers punaisés du lycée. Il y avait tellement de choses qui avaient le potentiel d’être intéressantes…mais rien ne la tentait. L’éducation n’était qu’un système dépassé. Les professeurs, pleins de bonnes intentions, se faisaient corrompre dès les premières années par des élèves trop épris de liberté, n’ayant pas saisi la valeur du travail. De plus, tous les anciens lycéens les mettaient en garde du choc des études supérieures.


Gretta n’attendait que ça, elle. Elle voulait sortir de ce « lycée général », sortir de la médiocrité banale demandée aux jeunes pour qu’ils soient bien encadrés et qu’ils ne partent pas trop loin…d’un côté leurs décisions n’étaient pas assez réfléchies et il valait mieux garder un œil sur eux, de l’autre on les usait à faire quelque chose qu’ils ne comprenaient pas ou peu. Gretta avait hâte de se spécialiser, de se retrouver avec des personnes plus captivantes et vivre des relations plus intenses. Même si elle avait peur…car elle ne savait pas du tout dans quelle filière elle voulait se retrouver. Dans tous les cas, elle trouverait un moyen involontaire de se sentir à part vis-à-vis des autres. Cette idée la rassurait sur elle-même, mais la dérangeait quand même.

Bientôt, bientôt elle aurait ce fichu BAC qu’elle oublierait l’année suivante, bientôt elle pourra continuer la monotonie mais d’une différente façon… que faire ? Comment vivre des aventures lorsqu’on se cache de soi-même ? Lorsqu’on vit dans une maison sur une colline, que la forêt d’en face n’a rien d’enchanté, que malgré tout vous aimez la nature et que l’aseptisation de la société et de l’esprit des gens vous répugne…

Gretta n’avait pas envie. Son être tout entier détestait les situations d’obligation où elle se sentait tellement coincée qu’elle ne savait plus du tout quoi ou comment penser. Pas envie. Et pourtant elle le sentait, ce temps qui passait et qui la poussait. Si seulement, par la simple force de sa volonté, elle pouvait changer le cours des évènements… non pas qu’elle fût fanatique d’histoires de maléfices en tous genres non plus.


« Pas envie… »

Coffie, ayant parlé aux autres amis pour lesquels il était venu, revint perturber l’esprit de la jeune fille (et pourtant, il le faisait déjà assez).


– Je dois filer entre tes doigts de fée…

« N’importe quoi… et dire que j’adore ce garçon… »

  Pourquoi pars-tu…

– Je veux rester moi-même, rien de plus simple.

– Mais moi aussi…

– Hum, mais toi tu deviendras toi-même à travers ça. C’est pas fait pour le moment.

– Parce que toi, tu es absolument sûr de ne plus changer ?

– Je suis sûr que le lycée n’a rien à m’apporter, en tout cas ! Allez, cessons de tergiverser. Un câlin pour mettre un terme à notre dialogue qu’est profond qu’en surface ?


Cette parole fit sourire la demoiselle qui rendit un peu l’étreinte de Coffie. Elle n’avait jamais été à l’aise avec ce qui concernait son physique. Elle n’était pas mal dans sa peau au point d’y porter atteinte, mais elle ressentait toujours une gêne à penser qu’elle avait un corps, sous ces vêtements rassurants.

« Profond qu’en surface… n’importe quoi lui ! »

Et le jeune homme partit. Gretta le regarda s’éloigner avec tristesse. Il était le seul vent de fraîcheur, dans sa vie. Être accrochée à ce point à quelqu’un la rendait malade, parfois, quand elle y repensait. Car les gens, ça abandonne… malgré le fait que Coffie lui ait pris la main en lui jurant de ne jamais la laisser tomber lorsque la jeune fille en a eu besoin. Elle repensa à ce moment, à ces paroles que Coffie lui avait dites… parmi les plus belles qu’on ait jamais eu envie d’entendre d’un être cher.

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