Il revint au sujet en ayant peur
de réveiller la douleur de la jeune fille.
–
Tu… tu ne sais pas si elle peut retrouver la
mémoire d’un coup ?
–
Les médecins ne savaient pas… je me suis même
demandé si ce n’était pas déjà fait… imagine qu’elle se souvienne mais qu’elle
ne veuille pas revenir pour ne pas nous faire souffrir.
–
Oui mais… tu ne penses pas que cela soit trop
tard ? Ca fait des mois que vous vivez sans elle et que vous essayez de
vous faire à l’idée que…
–
Mon père n’a retrouvé personne, l’interrompit
Gretta. Il faut que j’agisse vite. Je sais que, comme tous ces enfants de
parents séparés, ma volonté ne peut pas tout faire, mais… je veux essayer.
–
Es-tu sûre qu’il n’a personne, Gretta… je ne
veux pas briser tes espoirs, c’est bien que tu en aies, mais… fais attention.
La jeune fille fut très
contrariée par l’idée, mais préféra se perdre dans un souvenir heureux pour ne
pas trop y penser. Elle se revit, des années en arrière…
« On joue à « ‘trap ‘trap » Gus’ ?
–
Non ! C’est trop petit ici, et puis on va
tomber dans le bassin là !
–
Tu parles comme un parent !
–
Et toi tu es trop casse-cou !
–
Mais tout le monde joue à ça !
–
C’est pas une raison ! »
Une question la fit revenir au
présent :
–
Je ne t’ai pas blessée, au moins ? À quoi
penses-tu ?
–
À nous, petits.
–
Oh… sourit-il. Tu trouves que l’on a
changé ?
–
Pas vraiment.
« Si, je suis une coincée
maintenant. Nous deux, d’ailleurs. » se maudit-elle.
–
Mais on a quand même évolué, on passe
l’adolescence tranquillement, je trouve.
–
Hum. Moi je ne trouve pas. Ces prises de tête le
soir, ces crises existentielles, merci… murmura-t-elle.
–
Au moins, nous ne sommes plus égoïstes et
centrés sur nous-mêmes.
–
Tous les hommes le sont, je pense. C’est juste
qu’en grandissant, ils apprennent à le devenir à leur façon. Même les gentils
veulent leur bonheur, c’est juste qu’ils passent par les autres. Mais c’est
quand même une façon à soi d’être égoïste.
–
Tu vas me déprimer, plaisanta-til.
« Regarde, viens m’attraper maintenant !
–
Oh arrête Gretta ! C’est pas parce que t’as
des nouvelles grosses bottes que tu cours plus vite !
–
Siiii ! En plus j’ai une robe, mes jambes
sont libres ! S’tu veux pas jouer c’est pasque tu sais que tu vas
perdre !
–
Okay c’est vrai ! On joue à trois petits
chats à la place ?
–
T’es vraiment qu’un trouillard ! Okay mais
sans toucher les mains, parce que ça fait mal des fois ! »
« Le bon vieux temps… » se
remémora Gretta.
Le soleil se
couchait, à cette heure.
–
De quoi es-tu encore en train de rêver ?
sourit le garçon.
–
L’enfance… dire qu’on n’a pas conscience de
notre chance quand on est enfant…
–
C’est aussi pour cela que c’était bien.
–
Peut-être…
En regardant Gustave, Gretta
voulut lui faire part de son idée.
–
Dis-moi… que dirais-tu de venir avec moi en
ville, un samedi ?
–
Oh… je ne pensais pas que j’avais l’air hermite
et désespéré à ce point… murmura-t-il spontanément.
–
Mais non… et puis, si tu es avec moi ? le
convint-t-elle.
–
Pourquoi pas… il va falloir réfléchir à un moyen
de ne pas se faire remarquer.
–
Tu pourrais y être en ce moment même. Tes
parents savent que tu es avec moi, là ?
–
Touché, sourit-il. J’apprécie ton geste.
Pourquoi pas…
La jeune fille sourit à l’idée de
lui donner un peu de bonheur.








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